QUE C’EST BEAU BAIE-COMEAU !


Que c’est beau Baie-Comeau en ce 8 avril 2021 ! Depuis quelques jours, le temps est magnifique. Je peux marcher du Manoir de Baie-Comeau jusqu’à l’extrémité du quai. Que c’est beau Baie-Comeau, en longeant la côte dans le parc des Pionniers, entre le bleu de la mer et celui du ciel ponctué de quelques traînées blanches, en regardant la noria des crabiers dans le port. Que c’est plaisant de croiser nombre de chiens, tous en laisse, tirant et promenant leurs maîtres et maîtresses, même de rencontrer des petits jappeurs qui habituellement me tombent sur les nerfs… Je suis de bonne humeur ces temps-ci. C’est le printemps !
« Bonjour, il est bien beau votre chien… Est-ce vous qui l’avez tricoté ? » Et, la dame de répondre qu’elle venait d’adopter ce caniche au pelage bouclé, comme cette laine que l’on achetait dans les années soixante-dix pour se faire des ponchos en écoutant Joan Baez. 

Que c’est beau Baie-Comeau, quand deux p’tits vieux — plus jeunes que moi —, un homme et une femme, assis sur un banc public, personnes que je ne connais pas, s’extasient sur le beau temps et que je réponds espérer que cela va durer jusqu’au 15 décembre, ne tolérant la neige que juste pour Noël et le jour de l’An! 

Oies blanches à Baie-Comeau

Que c’est beau Baie-Comeau, quand les centaines de canards de la baie ondulent au gré des rides de l’eau et quand monsieur Canard plonge, laissant madame Canard seule sur son rocher affleurant au poli noir. À mon retour, plus de trois-quarts d’heure plus tard, elle sera encore seule, alors que son île aura doublé de superficie à marée baissante. 

Que c’est beau Baie-Comeau, quand, au loin, trois petits amas de neige, vestiges de la dernière bordée, font penser à un chat blanc relevant la queue pour pisser sur le chemin et que l’eau de la montagne s’engouffre dans une conduite trop étroite pour se jeter en cascades dans le fleuve! 

Que c’est beau Baie-Comeau, en passant devant la Bamba, le voilier de mon voisin et ami qui s’ennuie sur son traîneau dans l’attente d’affronter les humeurs du fleuve! De nombreux mariniers estivaux sont déjà à l’œuvre pour les radoubs du printemps. 

Que c’est beau Baie-Comeau en regardant les marins-pêcheurs décharger leurs centaines de paniers de crabes, même si on ne peut pas en acheter un seul sur place, comme cela se fait dans ma Bretagne natale, ou dans les ports du Mexique, de l’Italie et ceux de l’Espagne… J’ai retenu le nom d’un de ces crabiers, le Nutamet de Caraquet. Sans doute en raison de l’assonance. 

Que c’est beau Baie-Comeau, même en regardant l’insipide bâtiment cubique abritant le club nautique et l’information touristique, expression grandiose du non-génie d’un architecte sans imagination! Je vous l’ai dit, c’est le printemps et je suis de bonne humeur. Je peux au moins m’asseoir un instant à une de ses tables à pique-nique de la terrasse pour reprendre mon souffle. Qu’il est beau le F-A-Gauthier, ce magnifique traversier né en Italie, et dont l’unique fonction où il excelle est de se pavaner dans des cales sèches de chantiers maritimes, tel un bellâtre génois flamboyant et désœuvré devant la porte fermée de son usine. Je rêve pour ce bateau d’une métamorphose en hôtel-restaurant de luxe flottant, amarré à quai, avec dans ses cales un immense stationnement pour les Rolls, les Bugattis et les Maybachs de ses riches convives. C’est vrai, son design est incontestable.
Que c’est beau Baie-Comeau, alors qu’il n’y a aucun cargo à quai, ralentissement économique oblige, ce qui permet à des quidams comme moi d’y déambuler en toute quiétude et de poursuivre la conversation de la veille avec une amie journaliste et son chum! Que c’est beau d’apercevoir à tribord le Nutamet repartir pour le large dont le sillage chahute un kayakiste et son kayak. Le premier de la saison. Quel plaisir de tourner sur soi-même à 180 degrés au bout du quai en clignant des yeux pour découvrir quelques chalets et hameaux, dans le lointain, fragilement adossés à ces collines menaçantes, afin de terminer son panoramique sur le Manoir de Baie-Comeau et les maisons avoisinantes accrochées à flanc de montagne! Vanité bien précaire de l’occupation humaine. Que c’est beau de faire un pas de côté pour éviter d’écraser une coquille d’oursin évidée et desséchée, reliefs d’un festin de goéland abandonnés sur le béton! 

Que c’est beau Baie-Comeau, en constatant à mon retour que les deux p’tits vieux n’ont pas quitté leur banc public et d’échanger des sourires. Que c’est beau de rencontrer une maman et sa petite fille en tricycle intriguée par une fissure dans l’asphalte! Et moi de dire : « Ouvre bien les yeux. Il y a un fantôme rose caché au fond du trou… » La mère est entrée dans mon jeu. 

Que c’est beau Baie-Comeau, quand je croise pour la troisième fois une dame qui s’arrête devant le banc où je me repose un instant face à la mer et qui me chante avec de grands gestes : « Il est où le bonheur ? ». Et, je regagne ma voiture sur le stationnement. Je consulte ma montre. Elle m’indique que j’ai fait près de huit mille pas…
Crédit photo site Internet de la Ville de Baie-Comeau

Destinations




Flux RSS

Souscrire

Catégories

Mots clés

Autres articles

Archives